mercredi 8 janvier 2014

Janus, le Dieu qui préside aux passages et au changements, nous à ouvert il y a une semaine les portes d'un nouveau cycle, d'un nouveau stade du devenir universel, que doit parcourir un nouveau soleil.

Il ouvre progressivement les portes de l'année, pour nous laisser passer sans précipitation dans les temps nouveaux, pour nous laisser prendre les marques de l'étant nouveau appelé à accomplir une nouvelle phase de son destin, à agir dans le parcours d'un nouvel âge, renouvelant le destin éternel d'une main identique en un acte toujours différent.

"Agir" est peut-être la clé, le mot de passe de la fête de demain, l'Agonium Januarium du 9 janvier, célébré en l'honneur du Dieu Bifrons par le Rex Sacrificulum qui sacrifie dans la Regia, l'ancienne maison des Rois, le cœur même de la Ville.

Or, c'est un bélier qu'il sacrifie, quoi de mieux en vérité pour nous ouvrir les portes de la clarté nouvelle ? Car le bélier, nul ne l'ignore, est un animal solaire, igné, qui ouvre le chemin et conduit le troupeau. Festus nous dit que cette fête vient du mot agonalia, synonyme de hostia : "victime". Et c'est bien là la première victime qui tombera sur le chemin de la transhumance céleste : il conduira le troupeau resplendissant des autres victimes porte-fêtes pour porter aux Dieux nos espoirs, nos reconnaissances et nos joies de l'an qui vient.

Mais Varron nous parle, lui, de agone : "que fais-je" ? Interrogation primordiale de l'humain ici-bas, avant que soit engagé le cycle éternel de l'action rituelle. Question métaphysique de celui qui va passer de la puissance à l'acte, en suspens devant le champ vierge des possibilités encore inviolées.

Paradoxalement, une fois occis le bélier, débutera son galop. Le voilà parti dans les étoiles, il caracolera toute l'année dans les prés d'azur, nous revenant au printemps dans le zodiaque pour allumer les feux du soleil incitateur des actes. Pour moi, même si c'est probablement un pur hasard, je ne peux m'empêcher d'entendre Agni dans les Agonales, et Savitar dans l'invitation à agir que nous donne ce premier sacrifice, "agir sacré"...

Voici que sont béantes les portes de l'année, les deux battants s'écartent maintenant sous les coups de boutoir d'un bélier impatient d'en découdre...Voici que sont lâchées les puissances nouvelles qui s'élancent déjà vers leur réalisation.

Peut être les deux faces de Janus sont elles les deux battants de cet huis, et peut être vont elles maintenant se personnifier, ces puissances de réalisation, pour nous accoucher, nous et nos actes, vers une lumière nouvelle. Elles accompagneront sans doute nos hésitations et nos remords de leur ambiguïté, postvorta, antevorta...

Mais elles sauront nous pousser vers l'avant de leur fécond travail, Carmenta, et faire jaillir la source de notre créativité, Juturna, aidées des Camènes aux chants mélodieux, qui irriguerons notre chemin de leur verve prophétique.

Vous qui avez accompagné mes premiers pas dans la combe enchantée, Ô Camènes sacrées, toujours je serai vôtre. Le moment venu, après la promenade ensoleillée, vous me ramènerez je le sais dans le Jardin d'Antan, lorsque l'abeille qui habite mon cœur aura fini de butiner la corolle variée des choses et qu'elle s'en sera allé dans la ruche du ciel pour faire son miel du pollen tiré de l'expérience